Le Zéro artificialisation nette offre un angle d’attaque au Sénat, dans sa réécriture du projet de loi Climat et Résilience. Programmée du 14 au 28 juin avant le vote solennel du 29, la première lecture par la chambre haute buttera sur un calendrier qui laisse peu de place aux négociations en commission mixte paritaire, avant la seconde souhaitée par le gouvernement à partir du 2 juillet.
« Remettre les SCoT au cœur de la Zan » : par ce mot d’ordre en faveur des schémas de cohérence territoriale comme pilier de la lutte contre l’artificialisation des sols, le Sénat donne le ton de sa réécriture du projet de loi Climat & Résilience. La chambre haute programme la première lecture du texte, du 14 au 28 juin. Les 1076 amendements examinés en commission s’appuient sur les 1800 réponses à sa consultation lancée en mai auprès des collectivités locales. Non à la glaciation rurale.
Au nom de la commission Aménagement du territoire et développement durable, Jean-Baptiste Blanc s’insurge contre une prétention de l’Etat à s’ériger en « répartiteur des droits à construire » et à considérer les collectivités comme de « simples exécutantes ».
Les régions en prennent également pour leur grade , lorsqu’elles cèdent à la tentation du centralisme, dans leurs schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet).
Aux logiques jacobines qui alimentent la crainte d’une « glaciation rurale » exprimée par Marta de Cidrac, vice-présidente de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, le Sénat oppose un parti de confiance envers les élus locaux.
La critique de la méthode se décline dans la répartition entre la loi et ses décrets : le Sénat se battra pour que le législateur s’empare directement de la définition de l’artificialisation. La chambre haute entend encourager les chantiers de renaturation, absents dans le projet gouvernemental, à travers un fléchage par France Relance et une éligibilité aux financements des mesures compensatoires aux atteintes à l’environnement. Parmi les aides souhaitées dans le domaine de l’aménagement, la commission de l’aménagement du territoire défend l’idée d’une dotation climat qui viendrait encourager la planification locale ou régionale dédiée à ce thème.
Dans la rénovation énergétique, autre domaine crucial du projet de loi pour le secteur de l’aménagement et de la construction, la contribution sénatoriale vise d’abord la simplification.
« Nous proposons de supprimer la notion de rénovation complète, peu utile, et de mieux définir celle de rénovation performante ».
Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques
Une volonté d’assouplissement préside au délai accordé jusqu’en 2048, avant l’interdiction de mise en location de logements situés en classe D de performance énergétique. Très critiques sur l’application à l’écologie de l’idéologie du « en même temps », les sénateurs ont pourtant voulu donner une place à l’aérien, dans le titre « Se déplacer ».
« Un amendement rappellera que dans certains cas, les lignes d’aménagement du territoire constituent la seule solution »
Philippe Tabarot, rapporteur de la commission Aménagement du territoire et Développement durable.
Mais cette dernière insiste surtout sur le ferroviaire, « grand absent » de la première version du projet de loi . Le Sénat se prononce pour un doublement de sa part dans le fret. « La diminution de la TVA à 5,5 % constituerait un signe fort », énonce Philippe Tabarot. En revanche, le prélèvement d’écotaxes régionales ne recueille pas l’assentiment des sénateurs , qui jugent cette disposition prématurée, avant l’examen du projet de loi 4D et les arbitrages bruxellois sur l’Eurovignette.
S’il exprime son espoir dans une commission mixte paritaire conclusive, Jean-François Longeot, président de la commission Aménagement du territoire et développement durable, y met une condition : celle d’un report de la seconde lecture. Pour lui, laisser deux jours entre le vote solennel du Sénat et la seconde lecture à partir du 2 juillet, c’est « se moquer du monde ».