Question n° 23245 adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice publiée le 10/06/2021 page 3638
M. Laurent Somon attire l’attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice concernant le taux de recouvrement des amendes pénales en France. L’amende pénale est une peine régulièrement utilisée par les juges en correctionnelle, soit un tiers des peines prononcées. La crédibilité de la justice et de la réponse pénale réside dans la capacité à exécuter les décisions des juges au terme des procès. Or, plus de la moitié des peines pénales n’est pas payée par les coupables. Fin 2017, le taux de recouvrement des amendes pénales prononcées en 2016 était estimé à 48 %, soit 168 millions d’euros. En comparaison, le taux de recouvrement des amendes forfaitaires majorées « radars » est de 30 %. Le Sénat a également calculé le paiement différencié des amendes en fonction des contentieux. Le taux de recouvrement des amendes est particulièrement faible s’agissant des escroqueries (16 %), stupéfiants (23 %) ou vols (25 %), alors qu’il est nettement supérieur pour les infractions de conduite sous l’emprise de l’alcool (67 %), de santé publique (69 %), d’environnement (75 %) ou d’homicide ou blessure involontaire (80 %). Il lui demande de bien vouloir indiquer les mesures que le Gouvernement entend mettre en œuvre pour que, non seulement, l’exécution des décisions de justice soit effective, mais aussi pour pallier le manque à gagner d’environ 200 millions d’euros pour les finances de l’État.
Texte de la réponse publié le 05/08/2021, page 4880
Le recouvrement des amendes pénales, des condamnations pécuniaires, des amendes forfaitaires majorées et des droits fixes de procédure constitue une préoccupation commune du ministère de la Justice et de celui de l’Economie, des Finances et de la Relance à qui incombe principalement la mission de leur recouvrement. En effet, en vertu de l’article 707-1 du code de procédure pénale, « les poursuites pour le recouvrement des amendes (…) sont faites au nom du procureur de la République par le comptable public compétent ». Quant aux droits fixes de procédure, l’article 707-2 du code de procédure pénale renvoie à l’article 1018 A du code général des impôts qui dispose en son alinéa 7 que « ce droit est recouvré sur chaque condamné comme en matière d’amendes et de condamnations pécuniaires par les comptables publics compétents ». Le ministère de la justice reçoit chaque année du ministère des finances plusieurs indicateurs d’efficacité du recouvrement des montants pris en charge par ses services, au titre des amendes et droits fixes de procédure émis par les juridictions. Par ailleurs, ces indicateurs ne permettent pas d’estimer un taux de recouvrement des amendes, mais un taux de recouvrement des montants émis. Certaines données ont permis en effet de montrer qu’il existait une forte variabilité dans le recouvrement des montants émis selon la nature des infractions visées par les condamnations, variabilité qu’il est possible de corréler à la solvabilité des personnes. Le taux de recouvrement des montants émis par les juridictions pénales était de 39 % en 2019. Afin de favoriser le recouvrement des amendes pénales, de nombreuses actions ont été menées par le ministère de la justice, dans le cadre de ses attributions, parmi lesquelles l’application d’un abattement de 20 % du montant de l’amende au bénéfice du condamné s’il s’en acquitte dans un délai d’un mois, afin d’inciter au paiement volontaire immédiat, et ce conformément aux dispositions des articles 707-2 et 707-3 du code de procédure pénale issus de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004. Il convient d’ajouter la création de circuits destinés à assurer une information immédiate ou à très bref délai du Trésor public grâce au relevé de condamnation pénale (RCP) et la création du bureau de l’exécution des peines (BEX) depuis 2005 qui prévoit que « dans chaque tribunal judiciaire et dans chaque cour d’appel, il est institué un bureau de l’exécution des peines ». La généralisation de ce service du greffe judiciaire en 2014 s’est accompagnée de la mise en place de terminaux de paiement électronique (TPE) par carte bancaire au sein des BEX dont l’utilisation a été étendue au paiement des amendes contraventionnelles et dont l’implantation au sein des maisons de justice et du droit (MJD) a également été prévue dans une optique de proximité avec le justiciable. A ce titre, le Gouvernement travaille activement pour que chaque juridiction et chaque MJD soit dotées d’un TPE accompagné d’un service de maintenance, ce qui n’était pas le cas depuis des années. Le 4 septembre 2020, le ministère a adressé aux parquets généraux et aux parquets une dépêche relative à l’amélioration du recouvrement des amendes pénales et des condamnations pécuniaires qui rappelle d’une part, les pratiques permettant de favoriser le recouvrement rapide des amendes pénales et condamnations pécuniaires, et d’autre part, qui apporte des précisions sur les modalités de recouvrement liées à des situations particulières. Enfin, la coordination entre la direction départementale des finances publiques (DDFiP), la direction départementale de la sécurité publique (DDSP), le groupement de gendarmerie départemental et les parquets s’appuie sur des conventions de partenariat destinées à faciliter le recouvrement des amendes forfaitaires et pénales. Ces conventions assurent l’information du procureur de la République et du comptable public transmise par les forces de l’ordre lorsqu’une personne placée en garde à vue se trouve en possession d’une somme égale ou supérieure à 300 euros susceptible d’être saisie par le comptable public pour la paiement d’amendes forfaitaires ou pénales ou de droits fixes de procédure en procédant, le cas échéant, à une saisie-vente entre les mains de l’officier de police judiciaire.